**Avec la crise actuelle, plusieurs pays sont forcés de faire des déficits et d’augmenter l’aide directe à la population comme jamais auparavant. Une situation qui rappelle étrangement la crise de 1929 où les gouvernements ont dû intervenir avec la création d’un véritable système de chômage qui aura survécu à la crise et qui sera devenu une partie intégrante du filet social. Il ne serait donc pas surprenant de voir la même chose avec le revenu universel garanti (RUG). **
Deuxième partie
L’avènement de la prestation canadienne d’urgence (PCU) au Canada et l’implantation de plusieurs programmes de revenu garanti par les divers gouvernements semblent avoir donné une nouvelle crédibilité au mouvement pour un revenu universel garanti. Même les États-Unis, un pays fortement contre l’intervention de l’État dans l’économie, ont dû se résigner à verser un chèque d’aide à la plupart de leurs citoyens pour éviter que la crise ne dégénère encore plus. Une décision qui aura fait réagir plusieurs, mais qui aura ramené la proposition du démocrate Andrew Yang de verser 1000$ par mois à tous les Américains dans le débat public. Bien que je doute que les États-Unis en viennent à établir un RUG, plusieurs autres pays semblent se diriger vers cette solution et pas seulement de manière temporaire. L’Espagne, au moment d’écrire ces lignes, travaille sur un projet permanent de revenu de base qui changerait radicalement la vie des citoyens espagnols. 1 Il serait surprenant que l’Espagne soit le seul pays dans l’Union européenne à adopter un tel système, car la pandémie a frappé le Vieux Continent de plein fouet et mis à genoux économiquement plusieurs pays.
#### Quels sont les avantages d’un RUG?
À priori, donner une rente mensuelle à chaque citoyen de son pays peut sembler contre-intuitif et très coûteux, mais analysons pourquoi certains pensent qu’un RUG pourrait être financièrement et économiquement avantageux. Tout d’abord, il est important de comprendre que pour la plupart des partisans du RUG, ce dernier remplace la grande majorité des programmes sociaux actuels. Ce faisant, la bureaucratie est drastiquement réduite, le personnel nécessaire moins important et les possibilités de fraudes réduites. Certains, comme moi, poussent le bouchon jusqu’à parler d’abolir les pensions de vieillesse qui deviendraient désuètes en raison du nouveau système. Pour ce faire, il faudrait que le RUG soit mis à un niveau relativement élevé, similaire à celui du PCU. Il faudrait évaluer le coût d’une telle mesure, mais il est évident que son implantation réduirait énormément la taille de l’État et la complexité de son fonctionnement tout en augmentant la qualité de vie des citoyens. Pensez-y, avec un RUG similaire au montant du PCU, fini l’aide financière aux études, fini les crédits d’impôt complexes et les supercheries comptables pour aller chercher de l’argent caché dans des programmes douteux et plus besoin de s’inquiéter pour nos vieux jours que le système de pension échoue en raison du vieillissement de la population. Évidemment, l’implantation de ce système réduirait la pauvreté, mais il permettrait aussi aux gens d’avoir plus de flexibilité dans leur choix d’emploi, dans le choix du domaine d’étude et aussi pour certains parents de rester à la maison plutôt que d’utiliser les CPE. Certains avancent même l’idée qu’un tel système favoriserait l’entrepreneuriat2, car les gens auraient moins d’insécurités à se lancer en affaires. Plusieurs déplorent toutefois que dans un tel système, les riches reçoivent eux aussi un chèque chaque mois alors qu’ils n’en ont pas besoin. D’autres avancent que ce système coûterait trop cher et qu’il encouragerait les gens à ne plus travailler. Des arguments que nous entendons déjà à propos du système de chômage actuel qui en plus coûte une fortune en bureaucratie et en fonctionnaires pour traquer les quelques fraudeurs. Finalement, l’argument massue de la plupart des opposants est celui de l’inflation, mais comme le RUG utilise de la monnaie déjà existante et donc que la masse monétaire reste stable, cet argument semble avoir du plomb dans l’aile.
#### Différentes techniques.
Bien que le revenu de base soit le plus populaire de sa famille, plusieurs autres techniques et théories existent pour régler les problèmes entourant le filet social et le chômage. L’une de ces techniques a su gagner mon soutien plus que les autres et je me permets donc de vous la présenter. Il s’agit de l’impôt négatif sur le revenu ou « negative tax », une théorie proposée par Milton Friedman en 1962 dans son livre capitalisme et liberté3 qui combine les objectifs de réduction de la pauvreté, la réduction de la bureaucratie et une plus grande incitation au travail que le RUG standard. Comment est-ce possible? Simplement, l’impôt négatif sur le revenu assure un seuil minimum de revenu qu’un individu peut faire mensuellement en fonction du seuil de pauvreté. Prenons pour les besoins de la cause un seuil de pauvreté à 24 000$ par année ou 2000$ par mois et mettons en place un taux d’imposition négatif sur le revenu de 50%. C’est donc dire que toute personne faisant moins de 24 000$ fera ce revenu libre d’impôt premièrement, mais que l’état versera 50% de la différence entre le revenu de la personne et le seuil établi. Il devient donc impossible pour toute personne vivant dans un tel système d’avoir moins de 1000$ par mois et le système encourage tout de même le travail, car chaque heure travaillée et chaque dollar gagné augmente la richesse de l’individu. En effet, l’individu décidant de travailler un travail à temps partiel à 15$ de l’heure et gagnant 1000$ par mois se verra verser 500$ par l’état en vertu de l’impôt négatif sur le revenu. De plus, contrairement au système actuel qui pénalise les gens qui désirent travailler plus pour se sortir des programmes sociaux, le travail est récompensé financièrement : l’impôt négatif sur le revenu, comme le RUG d’ailleurs, met fin à cette fameuse trappe de la pauvreté dans laquelle plusieurs bénéficiaires sont prisonniers. Enfin, l’impôt négatif sur le revenu évite que les plus riches reçoivent des chèques du gouvernement sans toutefois rendre le système trop complexe pour que les gains en efficacité et les économies sur les fonctionnaires ne se fassent ressentir.
Bref, plusieurs possibilités s’offrent à nous, mais je crois sincèrement qu’il est temps pour le Canada et pour le Québec de se doter d’un tel système. Que ce soit un revenu de base universel ou encore un impôt négatif sur le revenu, il faut simplifier l’appareil étatique lorsqu’on parle du filet social et le rendre plus efficace. Il faut aider les plus démunis, mais tout de même encourager ces derniers vers le travail plutôt que de les punir comme actuellement. Il faut aussi comprendre que l’automatisation approche à grands pas et si nous ne préparons pas notre économie et nos gouvernements en fonction de cette nouvelle réalité, le réveil sera particulièrement brutal.
- ICI.Radio-Canada.ca, Zone International-. « L’Espagne envisage d’instaurer un revenu universel de base | Coronavirus ». Radio-Canada.ca. Radio-Canada.ca. Consulté le 1 mai 2020. https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1691644/coronavirus-covid-19-espagne-revenu-universel-base-pandemie-impact.
- MIT Sloan. « Negative Income Tax, Explained ». Consulté le 2 mai 2020. https://mitsloan.mit.edu/ideas-made-to-matter/negative-income-tax-explained.
- Nikiforos, Report Michalis, Marshall Steinbaum, et Gennaro Zezza. « Modeling the Macroeconomic Effects of a Universal Basic Income », 2017, 18.