**Les dernières nouvelles entourant le Parti Libéral du Québec rendent la tâche de vendre le PLQ comme plus nationaliste assez ardue. Après des mois de communication, de marketing et de travail de terrain pour changer l’image héritée de Philippe Couillard, la nouvelle cheffe a potentiellement réduit ces efforts à néant.**
Une prise de parole à l’Assemblé nationale devant les journalistes de la colline Parlementaire, la routine pour la cheffe de l’opposition officielle qui en a vu d’autre. Pourtant, cette allocution dégénère rapidement lorsque madame Anglade débute un discours en anglais et se fait interpeller par Louis Lacroix qui n’en croit pas ses oreilles. Un discours d’ouverture en anglais à l’Assemblée nationale contrevient à la tradition parlementaire au Québec et au concept fondamental de la prééminence du français au Québec comme seule langue officielle. Le seul fait d’agir ainsi aurait déjà été suffisant pour éveiller les passions dans la sphère politique, mais les remontrances en direct, émises par Louis Lacroix qui semble sermonner la cheffe de l’opposition officielle en l’interrompant en pleine allocution rendent l’instant viral. La routine s’est rapidement transformée en gestion de crise pour l’équipe des communications du PLQ qui tentera de se défendre en citant les allocutions en anglais de François Legault dans ses points de presse, sans succès, avant d’admettre l’erreur de leur cheffe et de promettre un retour à la tradition établie.
#### Le piège du PQ.
La semaine partait donc d’un bien mauvais pied pour le PLQ et madame Anglade, mais la politique étant un sport extrême, il faut s’attendre à des moments plus chauds. En pleine pandémie, les chances que les regards se tournent vers l’opposition sont plus faibles, l’erreur pourrait donc sombrer dans l’oubli… C’était sans compter la fameuse loi de Murphy et le 50e anniversaire de la crise d’octobre amenant avec lui des émotions intenses et des souvenirs bien différents selon l’âge et l’allégeance politique. Fin renard, Pascal Bérubé lance une véritable bombe à l’Assemblée nationale en réclamant des excuses au gouvernement du Canada pour l’implantation de la loi sur les mesures de guerre en octobre 1970 menant aux arrestations sans fondements de 497 Québécois et des perquisitions abusives envers 36 000 personnes. La CAQ n’a pas vraiment le choix de se dire en faveur en raison de leurs convictions nationalistes, Québec solidaire n’a pas beaucoup d’options depuis qu’ils ont officialisé leur position sur l’indépendance. Le PQ étant l’instigateur de la motion, il va de soi qu’ils voteront en sa faveur. Ne reste que le PLQ de Dominique Anglade, sortant d’un petit scandale sur l’usage de l’anglais, tentant de se rapprocher des francophones et de se détacher de l’image ultra-fédéraliste de Philippe Couillard. Ils sont pris au piège, s’ils refusent, la motion échoue et le blâme tombera sur eux, s’ils acceptent, les médias anglophones auront le beau jeu de dire qu’ils défendent et supportent les actions du FLQ et les actes terroristes menant à la mort de Pierre Laporte. Le PLQ choisira de refuser la motion en se dépêchant de mentionner qu’ils proposeraient leur propre motion cadrant plus avec leur vision des événements d’octobre 1970.
#### Le divorce semble consommé.
Si les récentes prises de position du PLQ peuvent être décevantes pour plusieurs, elles n’en demeurent pas moins le prolongement d’un divorce consommé entre l’électorat francophone et le PLQ. Depuis le départ de Robert Bourassa, mais aussi celui de Mario Dumont et la frange plus nationaliste du parti, insatisfait par la gestion post-Meech, le PLQ n’a jamais vraiment su regagner son image de parti des grands projets et du parti faisant grandir le Québec au sein du Canada. L’ère Charest aura été marquée par un manque de confiance, des soupçons de corruption constants, la commission Charbonneau, le déclin des infrastructures et du français, un marasme économique persistant et un manque criant de vision pour le Québec. Le passage de Philippe Couillard au pouvoir n’aura fait qu’enfoncer le clou avec l’austérité et le refus catégorique de monsieur Couillard de la moindre affirmation nationale de la part du Québec. La tâche s’annonçait déjà herculéenne pour Dominique Anglade avant ses deux décisions, mais combiné avec les sommets de popularité du gouvernement Legault, le regain nationaliste des Québécois et l’empiètement de Justin Trudeau sur les compétences provinciales, j’ai énormément de mal à voir comment le PLQ et sa cheffe pourront tirer leur épingle du jeu. À moins d’un changement de cap majeur au niveau des priorités de la population ou du parti, le PLQ semble condamné à devenir une option marginale chez les francophones du Québec. Si tel est le cas, le PLQ se verrait prisonnier du purgatoire politique qu’est l’opposition officielle sans aspiration au pouvoir.