Quelle solution pour nos régions

**La plus récente décision d’Air Canada de couper trente lignes régionales un peu partout au Canada et la fermeture de huit escales à des aéroports régionaux dont quatre au Québec à Val d’Or, Mont-Joli, Gaspé et Baie-Comeau. Une décision lourde de conséquences pour plusieurs municipalités éloignées et dépendantes du transport aérien pour leur développement économique et le maintien de services sociaux de qualité.**

La nouvelle est tombée comme une bombe pour plusieurs dirigeants régionaux. Déjà fortement touchées par la pandémie et avec une perspective de relance touristique peu encourageante, les régions ne pouvaient pas imaginer un pire scénario. Comment faire pour organiser des événements culturels, sportifs ou simplement recevoir une quantité suffisante de touriste sans liaison aérienne? Plusieurs festivals régionaux devront cesser leurs activités si aucune solution n’est trouvée ce qui aura un impact majeur sur la qualité de vie et l’attractivité des régions pour nos jeunes. Malheureusement, ce problème d’accessibilité et d’attractivité est connu depuis plusieurs années et Air Canada participe volontairement à conserver ce statu quo. Plusieurs fois le transporteur aérien a été pointé du doigt comme contrevenant aux règlements sur la concurrence pour conserver son monopole dans les régions et pouvoir gonfler les prix à des niveaux mirobolants.
#### Une question de survie et d’équité.
Il est impossible pour nos régions de prospérer et de se développer sans un service aérien adéquat, car les distances et l’absence d’un réseau de transport ferroviaire ou par autobus décent rend les voyages peu attrayants. De plus, comme je l’ai mentionné plus tôt, les régions souffrent déjà d’un déficit majeur d’un point de vue de l’offre culturel, des festivals et spectacles en comparaison avec les grands centres. Les rares festivals sont toujours appréciés et fonctionnent plutôt bien, mais il semble difficilement possible de convaincre autant d’artistes à venir performer dans des régions éloignées sans un service aérien adéquat. Sinon, il faudra augmenter considérablement la rémunération de ces derniers, un coût que plusieurs festivals ne peuvent pas se permettre. Évidemment, l’aspect du tourisme est important, car l’est du Québec et les îles y trouvent un moteur économique important mettant en valeur les atouts du territoire québécois. Malheureusement, le service, bien que présent était déjà très dispendieux et la couverture souvent insuffisante ce qui cause de la frustration aux dirigeants et citoyens régionaux et favorise l’exode des jeunes vers les grands centres. Ce n’est pas normal d’accepter que les citoyens des régions éloignées, payant leurs impôts au même titre que les citoyens des grands centres reçoivent des services comme s’ils étaient des citoyens de seconds ordres. Déjà que la pénurie de professionnel et de spécialiste frappe les régions de plein fouet et force plusieurs à devoir faire plusieurs heures de route pour des soins médicaux vitaux, il ne faudrait pas aggraver la situation et mettre inutilement des vies en danger parce que nous n’avons pas eu le courage d’agir. Le Québec n’a rien à gagner à ce que ses régions se vident et s’appauvrissent et il doit réagir rapidement pour éviter d’atteindre le point de rupture approchant rapidement.
#### Nationaliser ou subventionner?
La question demeure, comment fournir à nos régions éloignées un service aérien acceptable? La logique économique de l’aviation est construite sur les économies d’échelles et l’efficacité. Chaque dollar compte dans le milieu de l’aviation et aller perdre plusieurs milliers de dollars pour desservir 20 000 personnes n’est pas très alléchant pour une compagnie privée. Un autre facteur important influençant les prix en aviation est la concurrence. Encore une fois, si une région éloignée est déjà difficilement rentable dans une situation de monopole, il devient parfois carrément impossible d’avoir une véritable compétition. Le libre-marché semble donc incapable de répondre à notre problématique pour des raisons de logistiques, mais aussi purement économiques. Il reste donc deux solutions : subventionner une ou des compagnies et leur accorder le monopole dans les régions visées ou nationaliser une compagnie existante et lui donner comme mandat de desservir tout le territoire québécois et de créer de la concurrence dans les grands centres. J’ai tendance à favoriser la nationalisation, car on ne se retrouve pas à devoir constamment vérifier si la compagnie choisie respecte ses engagements et que l’on peut véritablement viser le développement régional en premier lieu avec une compagnie d’État. Une solution qui semble logique dans une optique où les municipalités réclament une décentralisation, une revitalisation et que cesse le système à deux vitesses favorisant les grands centres énormément. Ce serait un effort et un investissement dans le développement socioéconomique à long terme de nos régions, pour l’occupation du territoire et une amélioration de la qualité de vie de nos citoyens.
Le Québec devra faire des choix de société déchirant à la suite de la pandémie, mais il ne doit pas oublier l’importance d’avoir une économie forte partout sur son territoire et retenir la leçon que la pandémie nous a donnée sur la centralisation à outrance et la dépendance envers les autres. Favoriser le développement de nos régions avec une décentralisation des pouvoirs, des investissements en infrastructure, une stratégie économique favorisant notre indépendance alimentaire et un secteur industriel vigoureux devrait être une priorité à Québec. Créer un transporteur québécois cadre parfaitement à une telle stratégie et avec la situation actuelle.

Scroll to Top